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Tifnit, un village sacrifié : la destruction orchestrée du 25 décembre 2023.
Le 25 décembre 2023, une page sombre s’est écrite dans l’histoire du Maroc. Ce jour-là, le petit village de Tifnit, situé sur la côte atlantique à une trentaine de kilomètres au sud d’Agadir, a été rasé. Non pas par la force des vagues ou l’érosion côtière, mais par la main de l’État. Une décision brutale, justifiée par des raisons de «d’occupation illégale de l’espace maritime » et de « développement », qui a laissé les habitants désemparés et une communauté entière déracinée.
Un village ancré dans l’histoire.
Tifnit, un hameau berbère, était depuis des dizaines d’années un lieu de vie simple et authentique. Ses habitants, principalement des pêcheurs , vivaient en harmonie avec leur environnement, entre la falaise et l’océan. Le village, était un point de repère pour les pêcheurs locaux et un témoin silencieux de l’histoire des communautés côtières marocaines.
Une décision brutale.
Le matin du 25 Décembre 2023, les habitants de Tifnit ont été réveillés par le bruit des bulldozers et des engins de chantier. Avec une préavis de quelques jours, sans consultation, les autorités ont donné l’ordre de raser le village. Les maisons, les ruelles, les souvenirs , tout a été détruit en quelques heures. Les habitants, choqués et en colère, ont été contraints de quitter leurs foyers, emportant avec eux ce qu’ils pouvaient sauver.
La raisons invoquée par les autorités est simples : le village est construit sur le domaine maritime. Il est donc voué à la destruction en vue de l’agrandissement de la réserve naturelle de Souss-Massa . Mais pour les habitants de Tifnit, cette justification sonnent creux. Certains soupçonne des spéculations en vue de la coupe du monde de football en 2030 dont le Maroc et Co-organisateur avec l’Espagne et le Portugal.
« Ils auraient pu nous prévenir, nous proposer des solutions, nous reloger dignement », témoigne Bochta, un pêcheur dont la famille vit à Tifnit depuis toujours . « Au lieu de cela, ils ont tout détruit, comme si nous n’existions pas. »
Un traumatisme collectif.
La destruction de Tifnit a laissé une profonde cicatrice dans le cœur de ses habitants. Pour eux, ce n’est pas seulement un village qui a été rasé, mais une partie de leur identité. Les ruines de Tifnit, aujourd’hui silencieuses, racontent une histoire de résistance, mais aussi d’abandon. « Nous ne sommes pas contre le développement, mais pas à n’importe quel prix », un autre pêcheur explique,« Tifnit était notre maison, notre mémoire. Comment peut-on effacer tout cela du jour au lendemain ? »
Les images de la destruction ont rapidement circulé sur les réseaux sociaux, suscitant l’indignation et la colère. Beaucoup dénoncent un manque de transparence et de respect envers les communautés locales. « C’est une violation des droits des habitants », affirme un militant des droits de l’homme. « L’État a le devoir de protéger ses citoyens, pas de les déposséder. »
Un avenir incertain.
Aujourd’hui, les anciens habitants de Tifnit sont dispersés. Certains ont été relogés dans des villages voisins, d’autres ont trouvé refuge à Agadir. Mais pour beaucoup, la blessure reste ouverte. « Nous ne voulons pas seulement un toit, nous voulons retrouver notre communauté, notre vie », confie Mohamed, un jeune père de famille.
Le gouvernement marocain a promis des compensations et des projets de développement pour la région, mais les habitants restent sceptiques. « Ils nous ont déjà tout pris », murmure, le serveur du restaurant de plage Maxim’s. « Comment pouvons-nous leur faire confiance ? »
Un symbole des défis à venir.
La destruction de Tifnit pose des questions plus larges sur le développement au Maroc. Comment concilier modernisation et préservation du patrimoine ? Comment protéger les droits des communautés locales face aux grands projets d’aménagement ? Tifnit n’est peut-être qu’un village parmi d’autres, mais son histoire résonne comme un avertissement.
En ce début d’année 2025, les ruines de Tifnit rappellent que le progrès ne doit pas se faire au détriment des plus vulnérables. Elles nous invitent à réfléchir à ce que nous sommes prêts à sacrifier au nom du développement. Et peut-être, dans les décombres de Tifnit, trouverons-nous les clés d’un avenir plus juste et plus respectueux de ceux qui habitent cette terre.
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